N°1 – A propos de boues rouges et autres nuisances

Fin décembre, à travers un arrêté préfectoral, le gouvernement a autorisé pour six ans de plus le rejet en mer Méditerranée des résidus de bauxite produits par l’usine d’alumine Alteo de Gardanne.

Concrètement, ce sont des millions de tonnes de métaux lourds (arsenic, mercure, fer…) et de soude qui sont déversés au large de Cassis dans une fosse sous-marine, à travers un conduit long de 50 kilomètres, cela en plus des sites de stockage à ciel ouvert déjà présents depuis des décennies autour de l’usine, à Bouc-Bel-Air notamment, et dont les poussières toxiques vont se répandre aux quatre vents.  On repense spontanément à l’effondrement d’un bassin de rétention de boues rouges en Hongrie en 2010, qui avait fait une dizaine de morts et plus de cent blessés, en plus de la pollution des sols et des eaux dans un large périmètre…Comble du cynisme, Alteo entend bien rentabiliser ces déchets, sous forme de « bauxaline », matériau utilisé dans la construction.

Le tout avec la bénédiction du maire de Gardanne, élu PCF (ce parti aux mains sales, par ailleurs fervent défenseur du nucléaire, et dernièrement signataire de la loi sur l’état d’urgence), et avec un argumentaire qu’on pourrait résumer ainsi : « L’écologie, l’écologie, d’accord, mais l’emploi avant tout ! ». Un argumentaire largement repris parmi les quelques 500 employés du site,  peur du chômage aidant. Un condensé de ce qu’est l’horreur économique, tant en matière d’exploitation que de dévastation de l’environnement ; celle-ci s’aggravant à mesure que le capitalisme se dote de moyens technologiques et industriels pour maximiser le profit.

C’est au travers de détails comme celui-ci qu’on mesure l’ampleur du bourrage de crâne qu’on nous  sert quotidiennement, sous le nom de «  marche vers le progrès », de capitalisme vert, et dont le dernier épisode s’intitule COP21. Un mensonge de plus, destiné à rendre le désastre acceptable (et durable), et à faire croire qu’on peut vivre libres au sein de la poubelle des mondes, à déguster un yaourt bio avec l’esprit serein, quand bien même nous sommes plongés jusqu’au cou dans les décombres industriels, sa radioactivité diffuse et ses cancers de masse. A produire, respirer, bouffer de la merde.

Et surtout, brave citoyen-ne, promeneur-se à tes rares heures de loisir, ne va pas jeter un mouchoir usagé dans ces magnifiques calanques, oasis de nature que papa l’État prend tant de peine à préserver ( lire
« valoriser ») pour que la carte postale continue de faire envie. Le tout dans une région saturée de structures exhalant le parfum de la mort, de Fos-sur-Mer à la vallée du Rhône, de Berre-l’Etang à Cadarache. Mais de quelle « nature » parle-t-on exactement ?

Il y aurait tant à dire encore, mais la nausée n’est pas loin. Gardons nos forces pour combattre cette société si radieuse.

Comments are closed.